C'est en 1924 que l'une de ses relations, le Dr Thierry, directeur de l'école de médecine de Tours, le recommande à son ami Clémenceau qui accepte de le rencontrer à Parnay lorsqu'il se rend en Vendée dans sa propriété de Jard sur Mer. La rencontre a lieu et s'établit entre les deux hommes une réelle amitié, une relation étonnante entre l'homme de pouvoir et le vieux vigneron au franc parler. Dès cette première entrevue, Clémenceau entame une correspondance avec le Père « Cristal » : « Je ne veux pas tarder plus longtemps à vous dire combien j'ai été touché de votre aimable réception. Vos vignobles sont infiniment curieux comme effet d'une haute puissance de méthode, mais combien ,plus intéressante la personnalité du créateur. J'ai vu beaucoup d'hommes, un manchot peut compter sur ses doigts les hommes qui vous ressemblent. Voilà pourquoi je n'oublierai pas ma visite au château de Parnay. »
Cristal lui répond le 4 mai : « Bien cher Monsieur Clémenceau, merci de votre bon souvenir. Vous m'avez promis de revenir à Parnay lors de votre retour à Paris. Faites moi Je vous prie l'honneur de vous arrêter à Parnay et de déjeuner avec moi. Je serai content de vous faire lire la lettre que j'ai écrite à M. Deschanel, Président de la Chambre, le 14 janvier 1920. M. Clémenceau, M. Poincarré, vous êtes seuls capables de relever la France de ses ruines... »
Visites et correspondance se succèdent, au rythme des voyages de Clémenceau en Vendée. Parnay est l'étape obligée pour le plaisir des échanges entre les deux hommes et celui de la table : « C'est entendu le lundi 12 juillet à 20 heures du matin je me présenterai au château de Parnay avec une faim à tout dévorer. Tandis que vous dégusterez votre soupe au lait, vous me verrez engloutir tous les poissons de la Loire et le bétail de vos prairies, sans parler de l'arrosage Cristallique qui ne sera pas de l'eau de pluie. »
Mais l'âge affaiblit peu à peu le « Père Cristal » qui perd ses forces physiques. Il se voit contraint de confier à d'autres, l'exploitation de ses chères vignes et se rend compte que cela se fait de moins en moins dans son intérêt et dans celui de son vignoble qui tombe partiellement à l'abandon. Il décline de plus en plus et en est conscient ; il écrit dans sa dernière lettre à Clémenceau : « Je serai bien content de vous voir à votre passage mais je ne pourrai vous avoir à déjeuner, ce que je ne fais plus pour personne. Car je ne suis plus de ce monde. Je suis en train de mourir. Mais avant de m'en aller, ce sera une grande joie pour moi de vous serrer la main. »
Contraint par son état physique, il se résout à se réconcilier avec sa famille : une nièce, Mme Vigeant, vient s'installer à Parnay et s'efforce de prendre soin du vieil homme qui n'est pourtant pas facile à vivre.
Georges Clémenceau (1841-1929) |